vendredi 31 juillet 2009

BEDAZZLED - 1967


Stanley est un homme moyen, avec un appartement moyen, un métier moyen et une vie moyenne. Il rêve secrètement de Margaret à qui il n’ose avouer son amour, et après un énième échec, décide de se suicider… quand Satan vient à son aide et lui propose la réalisation de sept vœux en échange de son âme. Pari Faustien conclu mais Stanley se fait balader de fiascos en frustrations diverses : successivement transformé en milliardaire, en intellectuel, en tombeur, en star, en mouche et en nonne, il échoue à chaque fois lamentablement dans ses tentatives de séduction de Margaret, peu aidé il est vrai par le caractère taquin du Diable...

Bedazzled, c’est 68, le Swinging London, les Beatles, Agatha Christie, les fish and ships, Trafalgar Square, Scotland Yard et le délicieux accent suranné de Peter Cook. Un monde que Donen le californien n’eut pas le moindre mal à croquer, de la même façon qu’il peignit sans peine la France des chemins de traverse dans Voyage à Deux. Étonnant de modernité, tant dans ses décalages que dans ses discrètes innovations (le film alterne dessin animé, séquences en noir et blanc et multiples sauts de puces spatio-temporels), Bedazzled n’a peut-être pas la magnificence des grands chef-d’œuvres du réalisateur de Singin’ in the Rain. Il n’en reste pas moins un spectacle réjouissant, emportant ses menus défauts dans un tourbillon virtuose et éblouissant.

La parodie de Top of the Pops est la preuve ultime que Donen est bel et bien le cinéaste pop par excellence. Et qu’en la matière, aujourd’hui encore, il reste indépassable.

STALAG 17 - 1952

Un amoncellement de baraquements pourris dans un paysage reculé, grisâtre et boueux. Bienvenue dans le Stalag 17, un camp de prisonniers américains érigé en Allemagne en cette année 1944 et dirigé par le commandant Oberst von Scherbach (Otto Preminger). Une franche camaraderie s’est développée entre les soldats grâce à l’affabilité du chef de baraquement Hoffy. Et la troupe, inspirée par les frasques de Stosh et son copain Harry, s’acquitte tant bien que mal du quotidien en y allant de maintes pitreries envers les gardiens et les officiers du camp. Le moral est toutefois à plat suite à l’évasion ratée de deux compatriotes abattus sans cérémonie lors de leur tentative. De plus, l’interrogatoire serré subi par le lieutenant Dunbar, responsable d’une opération de sabotage, laisse planer le doute sur la présence d’un informateur parmi les pensionnaires du Stalag. Responsables de la bonne marche des opérations illicites, les soldats Duke et Price jettent rapidement leurs soupçons sur la personne du sergent J.J. Sefton, officier rusé et combinard menant une existence de confort relatif envers et contre tous et n’hésitant pas à faire du troc avec les Allemands pour s’assurer de certains privilèges. Sefton clame malgré tout son innocence dans cette affaire, mais la tension monte alors que Dunbar est menacé d’être envoyé à la Gestapo... autrement dit vers une mort certaine.

Adaptation de la pièce Donald Bevan et Edmund Trzcinski ayant connu un grand succès sur les planches de Broadway, Billy Wilder nous offre probablement avec STALAG 17 son film le plus intrigant, à mi-chemin entre la comédie bouffonne et le drame le plus pessimiste qui soit. STALAG 17 est sûrement un des portraits les plus caustiques et cyniques qu’il nous ait été donné à voir sur les effets néfastes de la guerre sur la psyché collective. Il est d’ailleurs intéressant de noter la nature détachée du point de vue des observations faites par le narrateur, qui n’est autre que Cookie, le sous-fifre taciturne de Sefton, sur les péripéties se déroulant dans le stalag. C’est à ce niveau que Wilder se permet de conserver un équilibre fragile entre le drame et la comédie.
Tout d’abord, en opposant la nature opportuniste de Sefton, qui se définit lui-même comme un survivant, au code de l’honneur strict et sans vergogne entretenu par les autres prisonniers du camp, dont l’apparence de franche camaraderie loufoque laisse parfois transparaître un sentiment de béatitude collective semblant, du moins selon Sefton, les mener tout droit à leur perte. Ce n’est pas un hasard si le personnage de Sefton s’avère un contraste frappant avec le reste du tableau illustré par le récit. Holden joue ici entièrement son rôle comme s’il s’agissait d’un drame, y allant de son style habituel, sobre et sans fioritures, où, avec son allure dégingandée et ses yeux légèrement fatigués d’où parvient un regard perçant, dénué d’illusions, il parvient à illustrer parfaitement le statut de paria de Sefton.
Il semble d’ailleurs ici la seule personne douée de véritable raison face aux autres prisonniers en opposant son pragmatisme propre à son instinct de survie à ces personnages plus grands que nature et caricaturaux à souhait : Stosh, le soldat balourd et fort en gueule rendu de façon fort réjouissante par un Robert Strauss s’appropriant presque toutes les scènes où il apparaît; Duke, la brute suspicieuse, incarné par un Neville Brand égal à lui-même; Dunbar, le lieutenant aux allures de sauveur apparaissant ici sous les traits d’un Don Taylor ressemblant à s’y méprendre à Robert Ryan; ou bien Price, le jeune soldat sans peur et sans reproche, véritable archétype de l’idéal américain dont le rôle est tenu par un jeune Peter Graves, le futur Jim Phelps de la série MISSION : IMPOSSIBLE. Il reste quand même dans cette savoureuse bouillabaisse quelques grands moments de comédies dont seul Wilder a le secret, ne serait-ce pour la performance du duo formé par Robert Strauss et Harvey Lembeck. De plus, le célèbre réalisateur Otto Preminger s’avère cocasse à souhait dans le rôle du commandant von Scherbach, nous gratifiant de la célèbre séquence de l’appel de Berlin qui est tout simplement à hurler. Billy Wilder mène le tout avec une solide et brillante mise en scène bien supportée par la caméra très mobile et nerveuse du chef-opérateur Ernest Lazslo et un montage sans temps morts de George Tomasini, faisant de STALAG 17 un des meilleurs films de guerre du cinéma américain.

mercredi 29 juillet 2009

LE CIEL EST A VOUS - 1944

À la suite d'une expropriation pour création d'un terrain d'aviation civile, le garagiste Pierre Gauthier et sa famille viennent s'installer en ville.
Le nouveau garage marche bien, mais bientôt, Pierre, qui fut le mécano de Guynemer est poussé par son ami, le Dr Maulette, à se laisser entraîner à son ancienne passion : il délaisse famille et métier pour donner des baptêmes de l'air.
Thérèse en fait un drame et Pierre jure de cesser. Mais c'est elle qui va bientôt succomber et tous deux volent ensemble. Thérèse truste les coupes locales tandis que son mari, qui s'est cassé un bras, ne s'occupe plus que de leur petit zinc. Ils sacrifient tout à cet avion, même le piano de leur fille. Quand elle s'estime prête, Thérèse et Pierre s'en vont à Marseille pour tenter de battre le record de distance, établi à 4 000 kilomètres. Mais c'est Lucienne Ivry, une femme pilote chevronnée que les officiels attendent pour battre ce record. Pierre et Thérèse s'inclinent et rentrent à l'hôtel. Pierre tente de se convaincre que c'est un bienfait car Thérèse aurait pu périr au fond de la Méditerranée ou dans le désert. Au matin, ils apprennent que Lucienne Ivry a battu le record avec 4 125 kilomètres. C'est peu, ils espéraient pouvoir faire 4600 kilomètres avec leur avion. Brusquement Thérèse décide de partir. Pierre a juste le temps de lui dire oui et d'avertir les officiels.
Mais l'appareil est démuni de radio et lorsque le soir, Thérèse n'a pas été signalée au Maroc, les officiels ne comprennent pas comment Pierre peut encore croire à la survie de sa femme.
Pierre rentre chez lui par le train. Sous la pluie il tente de calmer l'inquiétude de ses enfants. Mais chez lui sa belle-mère, qui a réuni ses amis bien-pensants accuse son gendre d'être responsable de la disparition de sa fille. Les coups de fils hargneux et dénonciateurs se succèdent. Le soir, c'est même l'émeute devant chez lui, les enfants prennent peur et Pierre, armé d'une manivelle, descend dans la rue. Mais ce qu'il prenait pour une émeute n'est qu'une foule en liesse. Thérèse a réussi. Elle est saine et sauve et a établi un nouveau record de 4 900 kilomètres.
Thérèse revient en avion et c'est en triomphe qu'elle est accueillie par la population du bourg et les membres de l'aéro-club dont Pierre est le nouveau président.

Inspiré d'un fait réel, le record du vol en ligne droite établi en 1937 par la femme d'un garagiste de Mont-de-Marsan, ce film dépeint les exploits sportifs d'une jeune femme passionnée d'aviation.
C'est surtout un film profondément anti-vichyste. Grémillon exalte le féminisme au moment où le pouvoir en place estime que la seule vraie place de la femme se trouve au foyer. C'est ce que diront les membres du conseil municipal qui, Maulette une fois mort, retireront sa subvention au couple.
Grémillon croit bien au contraire à l'héroïsme du Français de base et lance ainsi un message d'espoir vers la province, appelant à ne pas se résigner à la collaboration mais à rechercher toujours la liberté.
Sorti en février 44, mois où se tourne "Les enfants du paradis", ce sera le dernier succès public de Grémillon qui ne fera plus que trois films.
L'amour entre Pierre et Thérèse est rendu avec d'autant plus de force qu'il s'oppose au conservatisme moutonnier du village. Le plan d'ouverture du film, un troupeau de moutons avec, en parallèle, des enfants sous la conduite d'un curé ne dit sans doute pas autre chose.
On retrouvera, à la fin du film, lorsque tout semble perdu et que Pierre rentre seul avec les enfants, ce même plan des orphelins défilant. C'est, cette fois-ci, le destin qui les attend peut-être ; ce même défilé ayant été vu lorsque les enfants commentent, seuls, le départ de leurs parents pour l'envol de leur mère. Enfin le film se clôture sur ce défilé, comme une menace qui s'éloigne, alors que triomphent Pierre et Thérèse.
La menace villageoise, d'abord matérialisée par les coups de téléphone hargneux et dénonciateurs manque de virer au lynchage avant que Pierre ne se rende compte qu'on vient lui annoncer le triomphe de sa femme.
À cette meute qui hurle, Pierre oppose la sincérité de son amour : "J'ai pas d'idée moi, j'ai rien à dire, j'ai seulement de la peine."

Comme précédemment, avant de laisser partir Thérèse, il lui avait demandé :
"La plus grande preuve d'amour, c'est de te dire oui ou de te dire non ?"

IT HAPPENED TOMORROW - 1944

"C'est arrivé demain" est un film américain de René Clair réalisé en 1944 à Hollywood.

À l'occasion de la cérémonie de son anniversaire de mariage, un homme vieillissant se remémore les faits incroyables qui lui arrivèrent, à l'époque où il rencontra sa femme, et désirait devenir un journaliste célèbre. Tout commença alors qu'il fit le vœu, après avoir bu quelques verres, de pouvoir connaître les événements avant qu'ils ne surviennent… « Oui oui, c'est possible », lui dit le vieil archiviste.
À son réveil le journaliste découvrira que le journal qu'il a en poche n'est pas celui du jour, mais celui du lendemain...

Que feriez-vous si vous aviez en votre possession le journal du jour avec 24h d’avance ? Penseriez-vous à votre réussite professionnelle sérieusement boostée par ces quelques pages d’informations avant l’heure ? Viseriez-vous la fortune et les jeux de hasard ? Et si dans ce journal vous découvriez votre propre rubrique nécrologique ! Attendriez-vous la mort avec le stoïcisme d’un moine zen ou essayeriez-vous de l’éviter par tous les moyens ? Telles sont les questions que Larry Stevens, jeune journaliste ambitieux, ne cessera de se poser avec en point de mire une vie rêvée d’honnête homme amoureux à accomplir.
Pour la petite histoire, c’est Frank Capra qui avait originellement acheté les droits de l’histoire, directement inspirée d’une pièce de théâtre en un acte de l’écrivain anglais d’origine irlandaise, Lord Dunsany. H. P. Lovecraft, fan éperdu de son oeuvre, le considérait même comme un des grands maîtres de la littérature fantastique.

Quand le projet fut finalement proposé à René Clair, un pré-scénario de Hugh Wedlock et Howard Snyder accompagnait aussi le paquet cadeau. Qu’à cela ne tienne, René Clair, intéressé, accepta même de revoir le tout avec Dudley Nichols (scénariste attitré de John Ford et bourreau de travail). A raison de 9 heures de sueur par jour, le duo boucla en trois semaines, scénario, dialogues et découpage. René Clair était mort de fatigue mais il ne restait plus qu’à tourner ce petit bijou.
« C’est Arrivé Demain » est l’archétype du film faussement dévalué et qui, le temps passant, regagne ses galons et se révèle plus intéressant et subtil qu’on ne le croit. Tout d’abord, l’idée de base est originale et met en évidence l’esprit pionnier des grands réalisateurs du cinéma des années quarante qui touchèrent à tous les genres (mélodrames, drames, comédies, policiers, fantastiques) sans se poser de questions particulières. Ensuite, avec pour thèmes principaux les paradoxes temporels, René Clair, ici dans sa période américaine, joue habilement la carte de la comédie fantastique dotée d’un fond humaniste. On l’accusa de se tirer d’affaire en épousant les contours d’un genre facile dont le sujet de base ne serait qu’un alibi, c’était sous estimer le talent d’un réalisateur capable d’émouvoir avec peu et d’utiliser au mieux le talent des deux acteurs principaux que sont Dick Powell et Linda Darnell, superbe de grâce aérienne. C’est aussi attacher une trop grande importance à la lourdeur de certains thèmes contemporains et refuser d’apprécier la grandeur de la légèreté. René Clair utilise peu de choses finalement mais sa réalisation quasi pointilliste, procède par petites touches (une scène, un regard, une main qui se tend, un sourire) pour installer une ambiance et susciter le rêve à chaque plan.
Au final, soyons précis, dans le registre de la comédie fantastique, on a rarement fait aussi bien depuis.
La légèreté n’est pas ici une facilité mais un art. Un film obligatoire pour tous les passionnés de fantastique, de SF et de cinéma inspiré.

LILIOM - 1934

Liliom Zadowski est un homme à la dérive mais qui possède un grand succès auprès des femmes. Elles ne savent rien lui refuser. C'est ainsi qu'il rencontre la jeune Julie Boulard, une petite bonne aux yeux naïfs. C'est le grand amour. Mais un jour, le héros apprend que Julie attend un enfant, leur enfant. Peu après cette nouvelle, il se suicide pour échapper à la police.
C'est alors que des agents de la « police céleste » viennent le chercher, Liliom monte vers le paradis, il arrive à un immense commissariat où un agent moustachu lit, méfiant, le "Paradis-midi", grand quotidien de l'actualité divine. Il est condamné à 16 ans de purgatoire.
Liliom désire avant tout savoir si son enfant qui va naître, est un garçon ou une fille. Puis, ayant appris que ça allait être une fille, il demande à redescendre sur Terre pour s'en occuper...

Dans la filmographie de Fritz Lang, Liliom s’inscrit entre deux périodes importantes : fuyant l’Allemagne nazie, le réalisateur s’installe un an à Paris et accepte de tourner une nouvelle adaptation de la pièce de Ferenc Molnár avant de partir s’établir aux Etats-Unis.

Liliom est un film français qui paraît plus mineur que les autres films de Lang de cette époque mais on y retrouve la volonté du réalisateur d’explorer la psychologie de ses personnages, avec toujours une importance donnée au sentiment de culpabilité.

Le contexte social y joue aussi un rôle sous-jacent mais important, à l’instar de M. ou des Mabuse, et on retrouve aussi la même notion d’aveuglement des institutions. Par les décors, le jeu des acteurs, Liliom montre sans doute un peu trop ses origines théâtrales. Il faut saluer la belle performance de Charles Boyer qui sait toujours aussi bien mêler séduction et cruauté dans le même personnage.

mardi 28 juillet 2009

A BOUT DE SOUFFLE - 1959







En 1992 pour l'émission "Cinéma, cinémas", Claude Ventura s'installe pour une semaine à l'Hôtel de Suède, quai Saint-Michel, dans la chambre 12 où 33 ans plus tôt Jean-Luc Godard a tourné "A bout de souffle".
Il faut faire vite pour mémoriser une dernière fois l'endroit avant que n'entrent en scène les engins de démolition. La chambre est minuscule, le lit en occupe l'essentiel du volume. Il faut pratiquement l'enjamber pour aller de la porte à la fenêtre. L'équipe technique en est réduite à patienter sur le palier pendant que Godard et Raoul Coutard (à la caméra) filment le couple Jean Seberg-Belmondo.
L'été 1959, Godard tourne en quatrième vitesse et sans scénario, son premier long métrage avec la caution morale auprès du producteur Georges de Beauregard, de Claude Chabrol et François Truffaut qui a inspiré l'histoire à partir d'un fait divers piqué dans France Soir.
Godard écrit les dialogues au fur et à mesure, s'arrête parfois au bout de deux heures de tournage, ferme son cahier et annonce que c'est terminé pour la journée, il n'a plus d'idées.
"A bout de souffle" réalisé dans les rues de Paris au milieu des gens, un héritage du néo-réalisme italien, sans souci des raccords, va installer le cinéaste auprès de la profession comme un fou avec qui il ne faut pas travailler. Cette "mauvaise réputation" (dixit Belmondo qui ajoutera avoir eu la chance de faire les plus beaux films de Godard), va au contraire le servir, et quatre ans plus tard, c'est un réalisateur célèbre – les autres avaient du talent, lui du génie – qui entreprend à Capri, dans la villa de Malaparte, le tournage du "Mépris" avec une l'icône Bardot, l'actrice la plus photographiée au monde, cernée par les paparazzi perchés sur les rochers alentours.
Elle avait été dans "Et Dieu créa la femme" celle qui avait frappé les trois coups de la Nouvelle Vague. Sa liberté de jeu fascinait la jeune critique. Avec Bardot en objet et Fritz Lang en réalisateur, plus la musique envoûtante de Georges Delerue, c'est le cinéma qui est au centre du "Mépris" et les sentiments son sujet.
Jean-Luc Godard voulait faire son film avec Brigitte Bardot. Le livre d'Alberto Moravia n'est donc qu'un prétexte à montrer l'objet de son désir. Et cette façon qu'il a de filmer Bardot, à la fois naturelle et mystérieuse, avec sa voix traînante (dans le savoureux questionnaire à Piccoli sur certains endroits intimes de sa personne), imposant un style et un ton "JLG", telle qu'on ne la filmera plus jamais ainsi.« Le cinéma substitue à notre regard un monde qui s'accorde à nos désirs », dit le réalisateur dès le générique (sans générique) citant André Bazin, le "père" spirituel de la Nouvelle Vague.
Des désirs et des rêves, dans une perpétuelle fuite en avant, qui se transforme en cavale tueuse. Celle de Bardot s'enfuyant avec Jack Palance dans une Alfa Romeo rouge sang. Celle de Belmondo dans "A bout de souffle" tombant sur le pavé de la rue Campagne Première ("Tu es dégueulasse", dit-il à Jean Seberg avant de mourir). Avec Anna Karina dans "Pierrot le fou": « Qu'est-ce qu'on fera ? demande Marianne à Fernand.- Rien, on existera.- Oh là là ! Ce sera pas marrant ! » A l'hôtel de Suède, Claude Ventura appelle chez lui Jean-Luc Godard pour quelques questions sur "A bout de souffle". « Vous rêvez... » lui répond Godard, qui raccroche aussitôt.